Êtres vivants, esprits dépourvus de corps, les anges ont donné lieu à de nombreux traités théologiques, chez les Pères et les Scolastiques. Au début des Temps modernes, ils sont perçus comme offrant la possibilité d’un modèle inédit, d’un paradigme commode pour introduire des concepts absolus et homogènes de temps et d’espace. Ils fournissent ainsi à la physique moderne une « matrice conceptuelle », qui permet de faire fonctionner entre purs esprits des lois de nature inédites. Ils fournissent aussi des modèles de connaissance, de Suárez à Malebranche.
Mais on peut s’interroger sur leur propre connaissance : que peuvent-ils parvenir à connaître ? Et de quel type de connaissance peuvent-ils jouir ? Quelles sciences sont à leur portée ? Le type de durée qui est la leur rend l’accès difficile à beaucoup de sciences appliquées, de l’alchimie à la médecine. Il leur reste la musique et les mathématiques – mais même en mathématiques, la cinématique et les séries arithmétiques restent de connaissance indirecte. Pouvant compter en système binaire, les anges ne seraient-ils pas les premiers informaticiens ?