Pierre-Yves Le Pogam, archiviste paléographe (prom. 1989) et conservateur au musée du Louvre (département des sculptures), et Sophie Jugie, archiviste paléographe (prom. 1986), conservateur au musée du Louvre et directrice du département des sculptures, publient l’ouvrage La sculpture gothique, aux éditions Hazan (novembre 2020).
Présentation
Illustré par une iconographie en partie inédite, cet ouvrage porté par deux éminents spécialistes, Pierre-Yves Le Pogam et Sophie Jugie, envisage la sculpture gothique à la fois dans son développement artistique et dans son contexte de création (commandes, ateliers, outils, circulation des formes, etc).
À partir du milieu du xiie siècle, alors que l’art roman est encore en plein essor, certains développements de l’architecture occidentale annoncent une rupture profonde qui va donner lieu à une nouvelle étape de l’art européen, qu’on désigne après coup, depuis le xve siècle, par le qualificatif de gothique. Dans le domaine de la sculpture, il s’agit d’une période qui voit se déployer des évolutions multiples et décisives. Les églises, notamment les grandes cathédrales, se couvrent d’un décor sculpté foisonnant, à la fois didactique et séduisant, qui illustre les grands cycles de l’histoire chrétienne et fait appel à la sensibilité des fidèles.
Les xiiie et xive siècles sont aussi marqués par le retour à la ronde-bosse, le développement de la statuaire autonome, l’invention ou la recréation de genres disparus depuis l’Antiquité (les tombeaux et les portraits sculptés, la statue équestre), qui préfigurent tout ce que nous entendons aujourd’hui dans la notion de sculpture.
Ces inventions aboutissent, autour de 1400, à l’un des derniers moments où les différents pays européens utilisent la même langue stylistique, avant que n’apparaissent au xve siècle des idiomes artistiques profondément individualisés et nationaux, liés à la Renaissance, laquelle a créé par dédain le concept d’art gothique. Or, les sculptures réalisées dans tout l’Occident entre la fin du xiie et le début du xve siècle, loin d’exprimer la barbarie que voulaient y voir, en forgeant ce terme, les intellectuels du Quattrocento, illustrent un des sommets de l’humanisme européen, par leur capacité à transmettre aussi bien des valeurs transcendantes que les affects et les émotions d’ici-bas.